Le vol c’est la propriété numéro 8 - Naz

Ce nouvel opus de la “série” Le vol c’est la propriété est sorti il y a deux mois, soit plus d’un an après le précédent numéro. D’habitude épais d’une trentaine de pages tout au plus, celui-ci fait ni plus ni moins 64 pages, toutes consacrées à raconter une journée entre amis dans un jardin, surement en été. Si Naz aime dessiner et décrire des détails du quotidien, ici il se surpasse, en trois pages à peine on entre totalement dans ces vies qui ne sont pas les nôtres et qui ne nous ressemblent pas forcément. Les détails qui créent l’impression d’immersion sont là : les discussions animées pleines de réalités, la phrase coupée par une autre, le chien qui saute en arrière plan, le pantalon qui tombe de l’une, une autre qui se roule une cigarette en arrière plan, etc…

L’une des particularités du Vol c’est la propriété, outre le fait de raconter des vies avec une précision étonnante, est d’aborder la politique (entendez sociale) avec des situations et des échanges entre ses personnages qui placent un cadre à ces réflexions. Parfois militants, musiciens, plus ou moins impliqués dans des mouvements, plus ou moins en marge du système, plus ou moins bavards, les “héros” de ces récits sont pleins de nuances. Loin du discours tout fait et bien huilé, celui du Vol c’est la propriété, par la voix de ses personnages, est plein de tonalités, de contradictions parfois, de subtilités, de raison aussi. Naz est vraiment très très fort pour brouiller les pistes, pour ne pas pointer du crayon une vérité, mais pour montrer qu’avoir une conscience politique, une pratique militante, ce n’est pas si simple et c’est très loin d’être manichéen. Tout se construit, s’affine, se déconstruit, se nourrit d’échanges, de désillusions, de luttes, de musique, de bière, et encore d’échanges.

Là où Naz est encore particulièrement doué, c’est sur son dessin et son graphisme, forts, matures, subtiles. Mélange de traits nets et précis, de motifs et de hachures, et d’aplats un peu crads. Le style de Naz a une forte identité qui sert admirablement bien le propos. Dans ce numéro 8 il va encore plus loin en jouant par exemple sur la lumière : l’histoire commençant vers midi et finissant vers minuit, les pages sont de plus en plus sombres (voir les trois extraits correspondants au début, au milieu, et à la fin), l’effet est “doublé” par les dialogues de plus en plus fournis voire virulents.

Naz est au programme du festival Périscopages, il sera exposé à la Petite Orangerie du Thabor du 13 mai au 6 juin 2010, à ne rater sous aucun prétexte !
Naz participe aussi à la revue Le Nouveau Journal de Judith et Marinette, l’histoire qu’il a dessiné dans le numéro 15 a surement été une des choses les plus fortes qu’il m’ait été donné de lire.

Pour se procurer Le vol c’est la propriété numéro 8, voir le site des éditions La Chose :
http://la.chose.free.fr/